Le droit à l’oubli en assurance emprunteur : une seconde chance pour les anciens malades

Le droit à l’oubli en assurance emprunteur : une seconde chance pour les anciens malades

Fini le cauchemar des surprimes et des exclusions pour les anciens malades souhaitant souscrire une assurance emprunteur. Le droit à l’oubli leur offre désormais la possibilité de tourner la page sur leur passé médical. Décryptage de ce dispositif qui redonne espoir à des milliers de Français.

Origines et principes du droit à l’oubli

Le droit à l’oubli en matière d’assurance emprunteur trouve son origine dans la convention AERAS (s’Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé) signée en 2006. Cette convention visait à faciliter l’accès à l’assurance et au crédit pour les personnes présentant un risque aggravé de santé. Cependant, c’est véritablement la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé qui a consacré ce droit dans le Code de la santé publique.

Le principe du droit à l’oubli est simple : passé un certain délai après la fin du protocole thérapeutique, les anciens malades du cancer et de l’hépatite C n’ont plus à déclarer leur ancienne pathologie lors de la souscription d’une assurance emprunteur. Concrètement, cela signifie qu’ils peuvent être assurés aux conditions standard, sans surprime ni exclusion de garantie liée à cette ancienne maladie.

Conditions d’application du droit à l’oubli

L’application du droit à l’oubli est soumise à plusieurs conditions. Tout d’abord, il concerne uniquement les contrats d’assurance emprunteur liés aux prêts à la consommation, aux prêts immobiliers et aux prêts professionnels. Ensuite, les délais d’application varient selon l’âge du patient au moment du diagnostic et le type de pathologie :

– Pour les cancers diagnostiqués avant l’âge de 21 ans, le droit à l’oubli s’applique 5 ans après la fin du protocole thérapeutique et en l’absence de rechute.

– Pour les cancers diagnostiqués à partir de 21 ans, le délai est de 10 ans après la fin du protocole thérapeutique et en l’absence de rechute.

– Pour l’hépatite C, le droit à l’oubli s’applique 48 semaines après la fin du traitement en cas de réponse virale soutenue.

Il est important de noter que ces délais sont des maximums. La grille de référence AERAS, régulièrement mise à jour, peut prévoir des délais plus courts pour certaines pathologies.

Impact sur le processus de souscription

Le droit à l’oubli a considérablement simplifié le processus de souscription d’une assurance emprunteur pour les anciens malades. Concrètement, lorsque les conditions du droit à l’oubli sont remplies, le candidat à l’assurance n’a plus à déclarer son ancienne pathologie dans le questionnaire de santé. L’assureur ne peut donc plus prendre en compte cette information pour évaluer le risque et déterminer les conditions de l’assurance.

Cette avancée a un impact significatif sur l’accès au crédit pour les anciens malades. En effet, l’assurance emprunteur étant souvent une condition sine qua non pour l’obtention d’un prêt, le droit à l’oubli permet à de nombreuses personnes de réaliser leurs projets immobiliers ou professionnels sans être pénalisées par leur passé médical.

Évolutions récentes et perspectives

Le champ d’application du droit à l’oubli ne cesse de s’élargir. La loi du 28 février 2022 pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l’assurance emprunteur a apporté plusieurs avancées majeures :

– La réduction du délai général du droit à l’oubli de 10 à 5 ans pour les cancers et l’hépatite C.

– L’extension du droit à l’oubli à d’autres pathologies chroniques comme le VIH ou l’hépatite B.

– La suppression du questionnaire médical pour les prêts immobiliers inférieurs à 200 000 euros par assuré et dont le terme intervient avant le 60ème anniversaire de l’emprunteur.

Ces évolutions témoignent d’une volonté politique forte de faciliter l’accès à l’assurance emprunteur pour le plus grand nombre. Néanmoins, des défis subsistent, notamment pour les personnes souffrant de pathologies chroniques non encore couvertes par le droit à l’oubli.

Enjeux et défis pour l’avenir

Malgré les avancées significatives du droit à l’oubli, plusieurs enjeux demeurent pour les années à venir :

1. L’élargissement du dispositif à d’autres pathologies chroniques reste un défi majeur. Les associations de patients militent pour l’inclusion de maladies comme le diabète ou la sclérose en plaques dans le champ d’application du droit à l’oubli.

2. L’harmonisation européenne du droit à l’oubli est également un enjeu important. Actuellement, les dispositifs varient considérablement d’un pays à l’autre, ce qui peut poser problème dans le cadre de la mobilité européenne.

3. L’adaptation du dispositif aux progrès médicaux constitue un autre défi. Les avancées thérapeutiques peuvent en effet modifier le pronostic de certaines pathologies, nécessitant une mise à jour régulière de la grille de référence AERAS.

4. Enfin, la sensibilisation et l’information du public et des professionnels du secteur bancaire et assurantiel restent des enjeux cruciaux pour garantir une application effective du droit à l’oubli.

Le droit à l’oubli en matière d’assurance emprunteur représente une avancée majeure pour l’inclusion financière des anciens malades. En permettant aux personnes ayant surmonté une pathologie grave de tourner la page sur leur passé médical, ce dispositif contribue à restaurer l’égalité des chances dans l’accès au crédit. Bien que des progrès restent à faire, notamment dans l’élargissement de son champ d’application, le droit à l’oubli s’impose comme un outil essentiel pour concilier protection des assureurs et droit à l’emprunt pour tous.